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CONTES ORIENTAUX

fureur ? — Jeune étranger, me dit-elle, ne sois pas fâché d’avoir contribué à me venger de Namahran. C’était un traître. Tu ne le plaindras pas quand tu sauras son crime, ou plutôt quand tu apprendras qu’il est l’auteur de mon infortune, que je te vais raconter. »

HISTOIRE DE LA DAME TROUVÉE DANS UN SAC

« Je suis, poursuivit-elle, fille du roi de cette ville. Un jour que j’allais aux bains publics, j’aperçus Namahran dans sa boutique. J’en fus frappée, et malgré moi, son image s’offrait toujours à mon esprit. Je sentis que je l’aimais ; je combattis d’abord mes sentiments ; je m’en représentai l’indignité, et je crus que je les vaincrais par des réflexions. Mais je me trompais ; l’amour l’emporta sur ma fierté. Je devins inquiète, languissante, et mon mal s’augmentant de moment en moment, je tombai dans une maladie dont je serais morte infailliblement, si ma gouvernante, qui se connaissait mieux à mes symptômes que les médecins, n’en eût pénétré la cause. Elle m’engagea fort adroitement à lui avouer que ses conjectures n’étaient pas fausses. Je lui contai de quelle manière j’avais conçu mon malheureux amour ; et elle jugea, par ce que je lui dis, que j’étais follement éprise de Namahran.

Elle fut touchée de l’état où je me trouvais, et elle promit de soulager mes peines. En effet, une nuit, elle fit entrer dans le sérail le jeune marchand sous des habits de fille, et me l’amena dans mon