Page:Les Mille et Un Jours, trad. Pétis de la Croix, 1919.djvu/61

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
45
CONTES ORIENTAUX

condamne les conseils que vous a donné le vieux marchand. Mais, ajouta-t-il, je voudrais bien savoir le nom de ce prince. Quel roi peut avoir possédé tant de richesses ? Je suis fâché que cette inscription ne me l’apprenne pas. »

Le jeune homme fit encore voir au calife une autre salle dans laquelle il y avait plusieurs choses très précieuses, et entre autres, des arbres semblables à celui dont il lui avait fait présent. Ce prince aurait volontiers passé le reste de la nuit à considérer tout ce que renfermait ce merveilleux souterrain, si le fils d’Abdelaziz, craignant d’être aperçu de ses domestiques, ne l’en eût fait sortir avant le jour, de la même manière qu’il l’y avait mené, c’est-à-dire la tête nue et les yeux bandés, et lui, le cimeterre à la main, prêt à lui couper la tête, s’il faisait le moindre effort pour ôter son bandeau.

Ils traversèrent le jardin et remontèrent par l’escalier dérobé dans la chambre où l’empereur avait couché. Ils y trouvèrent encore les bougies allumées. Ils s’entretinrent ensemble jusqu’au lever du soleil. « Après ce que je viens de voir, dit le prince au jeune homme, et à en juger par l’esclave que vous m’avez donnée, je ne doute point que vous n’ayez chez vous les plus belles femmes de l’Orient. — Seigneur, lui répondit Aboulcasem, j’ai des esclaves d’une assez grande beauté ; mais je n’en puis aimer aucune. Dardané, ma chère Dardané remplit toujours ma mémoire. J’ai beau me dire à tous moments qu’elle a perdu la vie, et que je n’y dois plus penser ; j’ai le malheur de ne pouvoir me détacher de son image. J’en suis possédé à un point que, malgré toutes mes richesses, au milieu de mes prospérités, je sens que je ne suis pas heureux. Oui, j’aimerais mieux mille