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LES MILLE ET UN JOURS

voulut point qu’il ignorât l’histoire des tribus d’Arabes, l’histoire de la Perse, ainsi que les annales des rois. De plus, il apprit la morale, la philosophie, la médecine et l’astronomie. Il n’avait pas dix-huit ans, qu’outre toutes les choses que je viens de dire, il en savait encore d’autres. Il était bon poète et savant musicien. Il était d’ailleurs perfectionné dans tous les exercices du corps. Personne n’a jamais tiré de l’arc, ni manié le sabre et la lance avec plus d’adresse et de vigueur. Enfin, c’était un jeune homme d’un mérite accompli.

Quelle satisfaction pour un père d’avoir un semblable fils ! Abdallah l’aimait plus que sa vie, et ne pouvait vivre un moment sans lui. Cependant la mort, qui en veut aux heureux du siècle, vint bientôt enlever le marchand. Se voyant à l’extrémité, il fit asseoir Couloufe au chevet de son lit, et il employa ses derniers moments à lui donner de sages conseils. Après sa mort et ses funérailles, son fils prit possession de tous ses biens… Mais ce jeunne homme n’en fut pas plus tôt maître, qu’il commença à les dissiper. Il fit bâtir un palais, acheta des belles esclaves, et choisit plusieurs jeunes gens pour être les compagnons de ses débauches. Il passait les jours à se divertir avec eux ; on prodiguait chez lui les mets les plus délicats et les meilleurs vins. Ce n’étaient que festins, que danses et que concerts. Il vécut de cette manière pendant plusieurs années, comme si la source de ses plaisirs eut été inépuisable. Néanmoins il consuma tout son patrimoine. Il lui fallut vendre son palais et ses esclaves, et insensiblement il se trouva sans bien, ce qui réjouit fort ses ennemis.

Il se repentit alors de sa prodigalité. Il alla chez tous les jeunes gens qui avaient contribué à le ruiner.