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SUR LES ROMANS.

régné dans l’Orient. On y reconnoît cette générosité qui a toujours été une de leurs vertus favorites, et sur laquelle l’âme et la verve de leurs poètes et de leurs romanciers semble toujours exaltée. Les plus beaux traits en ce genre nous viennent d’eux : on ne sauroit le nier ; et ce qui rend cette nation remarquable, c’est la seule chez qui le despotisme paroît n’avoir ni avili les cœurs, ni étouffé le génie. Il n’y a point eu de despote plus absolu, plus redoutable que ce fameux Haroun ou Aaron, dont le nom revient à tout moment dans leurs contes, et dont le règne est l’époque la plus brillante du califat et de la grandeur des Arabes. On est toujours étonné de ces mœurs et de ces opinions singulières qu’inspirent à une nation ingénieuse et magnanime, d’un côté, l’habitude de l’esclavage, et de l’autre l’abus du pouvoir. Cette disposition, dans un prince d’ailleurs éclairé, à compter pour rien la vie des hommes ; et, dans ces mêmes hommes, la facilité à se persuader qu’ils ne valent pas plus