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LES MILLE ET UNE NUITS,

portoit, le coffre vint à s’ouvrir par malheur ; et alors ne pouvant souffrir la honte d’être exposé aux regards et aux huées de la populace qui nous suivoit, je me lançai dans la rue avec tant de précipitation, que je me blessai à la jambe de manière que je suis demeuré boiteux depuis ce temps-là. Je ne sentis pas d’abord tout mon mal, et ne laissai pas de me relever pour me dérober à la risée du peuple par une prompte fuite. Je lui jetai même des poignées d’or et d’argent dont ma bourse étoit pleine ; et tandis qu’il s’occupoit à les ramasser, je m’échappai en enfilant des rues détournées. Mais le maudit barbier, profitant de la ruse dont je m’étois servi pour me débarrasser de la foule, me suivit sans me perdre de vue, en me criant de toute sa force : « Arrêtez, Seigneur, pourquoi courez-vous si vite ? Si vous saviez combien j’ai été affligé du mauvais traitement que le cadi vous a fait, à vous qui êtes si généreux et à qui nous avons tant d’obligations, mes amis et moi ! Ne