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CONTES ARABES.

tempête si furieuse, que malgré l’art de nos matelots, notre vaisseau emporté par la violence des vents et des îlots, se brisa contre un rocher. Je ne m’arrêterai point à vous faire la description de notre naufrage ; je vous peindrois mal de quelle manière ma gouvernante, le grand visir et tous ceux qui m’accompagnoient, furent engloutis dans les abymes de la mer : la frayeur dont j’étois saisie, ne me permit pas de remarquer toute l’horreur de notre sort. Je perdis le sentiment ; et soit que j’eusse été portée par quelques débris du vaisseau sur la côte, soit que le ciel qui me réservoit à d’autres malheurs, eût fait un miracle pour me sauver, quand j’eus repris mes esprits, je me trouvai sur le rivage.

» Souvent les malheurs nous rendent injustes : au lieu de remercier Dieu de la grâce particulière que j’en recevois, je ne levai les yeux au ciel, que pour lui faire des reproches de m’avoir sauvée. Loin de pleurer le visir et ma gouvernante, j’enviois