Page:Les Mille et Une Nuits, trad. Galland, Le Normant, 1806, VI.djvu/10

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
2
LES MILLE ET UNE NUITS,

de son voyage. Dans la crainte où il étoit qu’elle n’eût quelque chose de sinistre à lui annoncer, il n’avoit pas la force d’ouvrir la bouche pour lui demander quelle nouvelle elle lui apportoit. La bonne mère qui n’avoit jamais mis le pied dans le palais du sultan, et qui n’avoit pas la moindre connoissance de ce qui s’y pratiquoit ordinairement, tira son fils de l’embarras où il étoit, en lui disant avec une grande naïveté : « Mon fils, j’ai vu le sultan, et je suis bien persuadée qu’il m’a vue aussi. J’étois placée devant lui, et personne ne l’empêchoit de me voir ; mais il étoit si fort occupé par tous ceux qui lui parloient à droite et à gauche, qu’il me faisoit compassion de voir la peine et la patience qu’il se donnoit à les écouter. Cela a duré si long-temps, qu’à la fin je crois qu’il s’est ennuyé, car il s’est levé sans qu’on s’y attendît, et il s’est retiré assez brusquement, sans vouloir entendre quantité d’autres personnes qui étoient en rang pour lui parler à leur tour. Cela m’a fait