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Page:Les Ravageurs, Jean-Henri Fabre.djvu/151

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LE BOMBYX CHRYSORRHÉE

sur les œufs, au nombre de trois à quatre cents. La ponte a lieu en juillet. Les œufs sont roses et disposés en tas sur une feuille.

Émile. — S’ils sont pondus sur une feuille, ils doivent tomber de l’arbre à la chute du feuillage et périr emportés par le vent.

Paul. — Le papillon qui dépose ses œufs sur une feuille sait fort bien ce qu’il fait. Le bombyx livrée et le bombyx disparate, dont les œufs doivent passer l’hiver et n’éclore que le printemps suivant, se garderaient bien au contraire de les confier à une feuille destinée à tomber bientôt. Le premier les colle solidement sur un rameau en un bracelet dont vous avez admiré la structure élégante ; le second les dépose sur l’écorce du tronc avec un matelas de bourre. D’où leur vient cette science de l’avenir ? Qui leur a dit que les feuilles tombent et seraient pour leur famille un établissement sans stabilité ? Ce n’est pas l’expérience, car les deux bombyx n’ont jamais vu les feuilles tomber : la petite chenille sort de l’œuf quand il y a déjà des feuilles pour la nourrir, le papillon qui en provient pond ses œufs et meurt avant la chute des feuilles. Si ce n’est l’expérience, c’est donc l’incompréhensible inspiration de l’instinct, qui voit l’invisible et connaît l’inconnu, parce qu’il y a une Souveraine Intelligence, qui sait tout, prévoit tout, dispose tout.

Le bombyx chrysorrhée obéit lui aussi à la prescience de l’instinct quand il pond ses œufs sur une feuille, car leur éclosion doit se faire bien avant la chute de celle-ci, dans la dernière quinzaine de juillet.

Émile. — C’est un malin, ce papillon ; il connaît