entame un cancan triomphal ; le major rentre brusquement, ordonne à quatre lignards qu’il amène d’empoigner les danseurs et nous annonce qu’il va rédiger un rapport et l’envoyer à qui de droit.
Le calme est enfin rétabli ; le lendemain nous faisons acheter des mangeailles par les infirmiers. Les jours s’écoulent sans autres incidents. Nous commencions à crever d’ennui dans cette ambulance, quand à cinq heures, un jour, le médecin se précipite dans la salle, nous ordonne de reprendre nos vêtements de troupier et de boucler nos sacs.
Nous apprenons, dix minutes après, que les Prussiens marchent sur Châlons.
Une morne stupeur règne dans la chambrée. Jusque-là nous ne nous doutions pas des événements qui se passaient. Nous avions appris la trop célèbre victoire de Sarrebrück, nous ne nous attendions pas aux revers qui nous accablaient. Le major examine chaque homme ; aucun n’est guéri, tout le monde a été trop longtemps gorgé d’eau de réglisse et privé de soins. Il renvoie néanmoins dans leurs corps les moins malades et il ordonne aux autres de coucher tout habillés et le sac prêt.
Francis et moi nous étions au nombre de ces derniers. La journée se passe, la nuit se passe, rien, mais j’ai toujours la colique et je souffre ; enfin vers neuf heures du matin apparaît une longue file de cacolets conduits par des tringlots. Nous grimpons à deux sur l’appareil. Francis et moi nous étions hissés sur le même mulet, seulement, comme le peintre était très gras et moi très maigre, le système bascula ; je montai dans les airs tandis qu’il descendait en bas sous la panse de la bête qui, tirée par devant pous-