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Page:Les Soirées de Médan.djvu/175

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de son sommeil, de la tranquillité de ses hypothèses et du calme de ses rêveries, il sursautait à des décisions emportées et à des actes violents.

— Vous partirez demain, madame, dit-il, avec un accent d’autorité.

Sa voix n’avait plus de colère, elle était rassérénée, et il parlait d’un ton de commandement, le verbe tranchant, d’une sécheresse hautaine qui d’avance faisait taire la réplique sur les lèvres du contradicteur.

— Vous me chassez, alors ?

— Parfaitement.

— Et j’irai ?

— Où vous voudrez, peu m’importe. Il ajouta : — L’important, c’est que vous partiez.

Elle le regarda fixement, dans les yeux, pour s’assurer qu’il disait bien vrai, pour voir s’il ne restait pas au dedans de lui quelque chose d’un désir ou d’un regret qu’elle pourrait exploiter. Ses yeux étaient calmes, sans une lueur. Cependant elle voulut essayer d’une dernière câlinerie, d’une de ces caresses qui, aux heures de leurs anciennes querelles, faisaient tomber les rancunes, étouffaient les récriminations, mais il la prévint.

— Assez, n’est-ce pas ! Je ne veux pas de vos simagrées.

Néammoins elle se rapprochait avec des ondulations de chatte, les lèvres tendues et comme frémissantes d’une promesse de luxure. Penchée sur lui, elle essaya de l’embrasser. Mais d’un geste brusque il la repoussa.

— C’est moi le maître ! ici. Ce qui est dit est dit, foutez-moi la paix !