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Page:Les Veillées du couvent, ou le Noviciat d’amour, 5793 (1793).djvu/142

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Les veillées

mais encore, je croirais te faire une injure en l’aimant ; et si tu ne t’en irritais pas, je croirais que tu ne m’aimes point. — Tu ne m’aimes donc pas, Agnès ?… — Peux-tu former un semblable doute, cher amant, et faire cette question à celle qui doit sa vie et son bonheur à ton zèle, et qui ne sçut jamais aimer personne faiblement ? — Eh bien, si tu m’aimes, serait-il dans l’ordre que tu me visses sans colère et sans plaintes, porter à une autre que toi mon hommage, mes desirs, mes forces et le culte qui t’appartient ? — Cela est vrai, dit Agnès, je commence à sentir la justesse de cette réflexion. Tu serais peut-être fâché toi-même, si je te quittais pour un autre. — Certainement, dit le Sylphe. — Mais, dit notre modèle d’amitié, la nature des circonstances force quelquefois à faire exception à la règle générale, et à heurter un peu les principes reçus. Le moral doit quelquefois céder au physique… Nous sommes au couvent, et une manière d’être, contraire au droit naturel peut nous justifier d’une action qui, heurtant, les conventions civiles et les loix de la société, se rapproche plus qu’elles