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PRIMAUT ET LE LARDIER DU VILAIN.

je ne puis sortir. — Voyons, essayez d’avancer la tête et de pousser. » Primaut suit le conseil qu’on lui donne ; Renart le prend alors aux oreilles, tire le plus fort qu’il peut, jusqu’à lui mettre le cuir en écharpe. Mais il a beau tirer de haut, de bas, de côté, tout est inutile, le ventre résiste toujours. « Essayons un autre moyen », dit Renart, « car le jour ne tardera guère ; le vilain peut venir, et s’il nous trouvoit là… Attendez-moi, compain, j’y suis ; je vais chercher à vous tirer de ce mauvais pas. » Il court au bois tailler une branche dont il fait une hart, et revenant à Primaut : « Il faut maintenant pousser et tirer de toutes vos forces, car pour rien au monde je ne vous laisserai en pareil danger. » Et ce disant, après avoir passé la hart dans le cou de Primaut, il s’appuie d’un côté à la paroi du mur et tire de l’autre de façon à ce qu’une partie du corps se trouve engagée comme la tête ; il ne cesse de répéter avec componction : « Saint-Esprit, aidez-nous ! faudra-t-il laisser ici mon compain, mon ami ! Non, assurément. » Du col au sommet de la tête il enlève et rebrousse la peau du pauvre Primaut ; vaincu par la douleur, le patient jette un long cri, le vilain s’éveille et sort du lit, voilà qu’il accourt toutes jambes.

« Laisse-moi, laisse-moi, Renart ; j’aime