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LES VIES D’ARTISTES

à Florence. Pendant qu’on élevait, sur les dessins de Niccola, la petite église de la Misericordia[1], sur la place de San Giovanni, il sculpta en marbre la Vierge, saint Dominique et sainte Madeleine qui l’encadrent et qui ornent encore aujourd’hui la façade extérieure de cette église.

Dans ce temps[2], les Florentins avaient entrepris de renverser un grand nombre de tours qui menaçaient la sûreté du peuple dans les luttes fréquentes qui s’engageaient entre Guelfes et Gibelins ; mais il leur paraissait devoir être très difficile de détruire, sur la place de San Giovanni, la tour del Guardamorto qui avait une élévation extraordinaire et dont les pierres étaient tellement liées que l’on ne pouvait les séparer avec la pioche. Alors Niccola, ayant fait couper le pied de la tour d’un côté en l’étayant avec des chevalets courts d’une brasse et demie, mit ensuite le feu aux chevalets, et la tour, s’étant désagrégée, s’écroula d’elle-même. Ce moyen parut tellement ingénieux et commode pour ce genre de travaux qu’il est devenu d’un usage courant quand on veut rapidement jeter à terre un édifice. Niccola assista à la première fondation du Dôme de Sienne et dessina le temple de San Giovanni[3], dans la même ville ; puis, étant retourné à Florence, l’année même que les Guelfes revinrent[4], il donna les plans de l’église Santa Trinità et du monastère des religieuses de Faenza, actuellement détruit et remplacé par la citadelle[5].

Appelé ensuite par les habitants de Volterra, l’an 1257, qu’ils se soumirent aux Floretitins, pour agrandir leur cathédrale qui était de petites dimensions, il rectifia sa forme, sans la redresser entièrement, et la rendit plus magnifique qu’elle n’était auparavant. Étant finalement de retour à Pise, et voulant laisser de lui un souvenir à sa patrie, il sculpta en marbre la chaire de San Giovanni[6] et y représenta, entre autres choses, le Jugement dernier. Les nombreuses figures qu’il y fit sont, sinon parfaites de dessin, du moins travaillées avec un soin et une patience infinies. Comme il pensa avec raison avoir fait une œuvre digne d’éloges, il grava au bas ces vers :


Anno milleno bis centuni triceno
Hoc opu insigne sculpsit Nicola Pisanus[7].

  1. Fausse attribution. Ce petit monument, appelé aujourd’hui le Bigallo, fut élevé en 1352. Les sculptures delà façade sont de Filippo di Cristoforo et datent de 1413.
  2. En 1248, d’après Villani. (Liv. VI, ch. XXXI).
  3. Attributions douteuses.
  4. En 1250, d’après Villani. (Liv. VI, ch. XLII.)
  5. Erreur. Le couvent est de 1281, et Niccola mourut en 1278.
  6. Achevée en 1260.
  7. Incomplet ; il manque le troisième vers : Laudetur digne tam bene docta manus.