Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/312

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lui dit : « Quelle œuvre fais-tu donc là, pour que tu la tiennes si bien rrenfermée ? » Paolo lui répondit seulement : « Tu la verras, et que cela te suffise pour le moment. » Donato ne voulut pas le pousser à parler davantage, pensant voir comme à l’ordinaire quelque merveilleuse peinture, quand il serait temps. Un matin donc, se trouvant au Mercato Vecchio, pour acheter des fruits, il vit Paolo qui découvrait son œuvre, et comme il le saluait courtoisement, Paolo, désirant ardemment connaître son opinion, lui demanda ce qu’il pensait de sa peinture. Donato, après l’avoir bien examinée, lui dit : « Eh ! Paolo, tu la montres, maintenant qu’il serait temps de la cacher ! » Paolo, effectivement affligé, s’entendit ainsi blâmer de sa dernière œuvre, dont il attendait de grands éloges, et n’osant plus, par honte, sortir de chez lui, il se renferma dans sa maison, où il continua à s’appliquer à la perspective, qui le tint pauvre et l’esprit enténébré jusqu’à sa mort.

Finalement, devenu vieux et ayant eu peu de contentement dans sa vieillesse, il mourut l’an 1432[1], à l’âge de 83 ans et fut enterré à Santa Maria Novella. Il laissa une fille qui savait bien dessiner. Sa femme racontait que, toute la nuit, il restait dans son cabinet, à trouver les règles de la perspective, et que, quand elle l’appelait au lit, il répondait : « Oh ! quelle douce chose que cette perspective ! » En vérité, si elle lui fut bien douce, elle ne fut pas moins précieuse et utile, grâce à lui, à ceux qui s’y sont exercés après lui.




Lorenzo GHIBERTI
Sculpteur florentin, né en 1378, mort en 1455

Lorenzo[2], fils de Bartoluccio Ghiberti, apprit dès ses premières années l’orfèvrerie chez son père, qui était passé maître dans cet art, mais ne tarda pas à être surpassé par son élève. Comme il se sentait plus de goût pour la sculpture et le dessin, Lorenzo pratiquait souvent

  1. Mort le II décembre 1475, à 78 ans, d’après le livre des Morts de Florence. Enterré à Santo Spirito, dans le tombeau de sa famille. Sa fille Antonia naquit en 1451, se fit carmélite, et mourut en 1491. Le registre des Morts l’appelle pittoressa.
  2. Fils de Cione di Ser Buonaccorso et de Madonna Fiore, qui se remaria avec Bartolo di Michele, orfèvre. Dans les documents, avant 1448, il s’appelle Lorenzo di Bartoluccio, mais il reprit le nom de son père après cette année-là, ayant eu un procès (qu’il gagna), où l’on mettait en doute la légitimité de sa naissance. — Immatriculé à l’Art des Orfèvres le 3 août 1409.