Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/322

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Caïn présentant les siennes moins bonnes. L’attitude de Caïn reflète sa haine contre son prochain et celle d’Abel son amour pour Dieu. Il est singulièrement beau, le groupe de Caïn labourant la terre avec une paire de bœufs, qui paraissent vraiment naturels, tant ils tirent avec peine le joug de la charrue. Ensuite Caïn donne la mort à Abel, pendant qu’il garde ses troupeaux. Dans une attitude cruelle et pleine d’impiété, il assomme son frère avec un bâton, de manière que le bronze lui-même montre la langueur des membres inanimés du beau corps d’Abel. Dans le lointain du bas-relief, Dieu demande à Caïn ce qu’il a fait d’Abel. Ainsi chaque panneau contient les effets de quatre événements.

Sur le troisième panneau, Ghiberti représenta Noé sortant de l’arche avec sa femme, ses fils, ses filles et belles-filles, ensemble avec tous les animaux de la terre et de l’air. Ceux-ci, chacun dans son genre, sont taillés avec la plus grande perfection que l’art ait pu mettre dans l’imitation de la nature. On voit l’arche ouverte et tous les effets du déluge mis en perspective avec un si faible relief que l’on ne pourrait assez louer leur beauté. Les figures de Noé et des siens ne sauraient être ni plus vives, ni plus promptes. Pendant qu’il sacrifie, on voit l’arc-en-ciel, signe de paix entre Dieu et lui. La scène la plus belle est celle où il plante la vigne ; enivré par le vin qu’il a bu, il montre ensuite sa nudité et Cham, son fils, le tourne en dérision. En vérité, on ne saurait mieux représenter celui qui dort, car on remarque l’affaissement de ses membres sous l’influence du vin, de même que l’amour et le respect de ses deux autres fils qui le recouvrent, avec de très belles attitudes. Il faut remarquer de plus les pampres, le tonneau et les autres apprêts de la vendange représentés avec jugement et répartis sur certains points du panneau, de manière qu’ils ne rendent pas la scène confuse, mais qu’ils lui font un admirable ornement.

Sur le quatrième panneau, Ghiberti se plut à représenter l’apparition des trois anges dans la vallée de Manibré. Ils sont semblables l’un à l’autre, et le saint vieillard les adore, avec une disposition de ses mains et de son visage, appropriée et pleine de vie. Il sculpta avec amour les serviteurs d’Abraham qui l’attendent avec un âne, au pied de la montagne, pendant qu’il y est monté pour sacrifier son fils. Celui-ci est nu sur l’autel et son père le bras levé, s’apprête à faire son devoir, mais il est empêché par l’ange qui, d’une main le retient et, de l’autre lui montre où est le mouton qu’il doit sacrifier, sauvant ainsi Isaac de la mort. Cette histoire est vraiment très belle. Entre autres choses, on voit une très grande différence entre les membres délicats d’Isaac