Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/444

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Messer Bernardo, chevalier des Giugni[1], qui, pour avoir été une personne honorable et très estimée, obtint cet hommage de la part de ses frères. Outre le sarcophage et la statue du mort représenté au naturel, Mino exécuta une figure de la Justice, qui rappellerait complétement la manière de Desiderio, si ses draperies n’était pas mesquinement attaquées au ciseau.

Cette œuvre fut cause que l’abbé et les moines de la Badia, où fut placé ce tombeau, lui donnèrent à faire le monument[2] du comte Ugo, fils du marquis Hubert de Brandebourg, qui laissa à la Badia quantité de biens et de privilèges. Désireux donc de l’honorer le mieux qu’ils pourraient, ils firent faire à Mino, en marbre de Carrare, un mausolée qui est la plus belle œuvre sortie de ses mains. On y voit quelques enfants soutenant les armes du comte, qui sont campés fièrement et avec une grâce toute enfantine ; outre la statue du comte, couchée sur la bière, il y a au-dessus la figure de la Charité, environnée d’enfants, qui est d’un travail très soigné et s’accorde parfaitement avec le reste. On peut en dire autant d’une Madone tenant l’Enfant Jésus et contenue dans un demi-cintre, que Mino s’efforça de faire la plus semblable qu’il put à la manière de Desiderio. Certes, s’il s’était plus aidé de la nature et s’il avait plus étudié, il est hors de doute qu’il aurait fait de grands profits dans l’art. Ce mausolée coûta 1.600 livres et fut achevé en 1481[3], pour la plus grande renommée de l’auteur.

On lui commanda peu après, dans une chapelle de l’évêché de Fiesole, près du chœur, à main droite en montant les degrés, un autre tombeau, pour Leonardo Salutati, évêque de cette ville[4]. Il le représenta, en habits sacerdotaux, semblable au vif autant qu’il est possible. Il sculpta, en marbre, pour le même évêque, une tête de Christ, de grandeur naturelle, très bien travaillée, qui resta à l’hôpital degli Innocenti[5], entre les autres choses de son héritage.

Dans l’église paroissiale de Prato, Mino fit une chaire[6] entièrement en marbre, sur laquelle sont représentés des sujets tirés de la vie

de la Vierge, exécutés avec grand soin et si bien assemblés, que toute

  1. Mort en 1466 ; ce tombeau existe encore.
  2. Tombeau commandé en 1469 pour 1.600 livres ; existe encore.
  3. Date portée sur l’épitaphe.
  4. Mort en 1466 ; ce tombeau, qui existe encore, fut commandé par l’évêque de son vivant. Signé OPVS MINI. Il y a, en face du tombeau, un grand autel, en marbre, également de Mino.
  5. Y est encore, dans le bureau de la garde-robe.
  6. Elle lui fut commandée conjointement avec Antonio Rossellino ; terminée en 1473. En place.