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venir de Vérone, par le cours de l’Adige, des marbres genre Mischio et toutes autres sortes de pierre. De celles-ci, on s’en sert peu, ayant l’habitude de la première, et l’on y enchâsse souvent du porphyre, du serpentin et d’autres pierres bigarrées, qui, assemblées avec l’autre, font un effet décoratif merveilleux. Cette pierre tient de la pierre à chaux, comme celle de nos pays, et comme on l’a déjà dit, on la fend commodément. Restent à examiner la pierre sereine (calcédoine) et la pierre grise appelée macigno ; puis la pierre de taille dont on se sert beaucoup dans les régions montagneuses de l’Italie, particulièrement en Toscane, le plus souvent à Florence et dans son territoire. La pierre qu’on appelle sereine tire sur l’azur, ou bien est teintée de gris ; on l’extrait en divers endroits près d’Arezzo, ainsi qu’à Cortone, à Volterra et dans tous les Apennins. Celle qu’on trouve dans les monts de Fiesole est très belle, car elle offre une très grande fermeté, comme nous pouvons le voir dans tous les édifices que Filippo di ser Brunellesco a élevés à Florence ; c’est de là qu’il a extrait toutes les pierres de San Lorenzo, de Santo Spirito et une infinité d’autres pierres qui forment les édifices que l’on voit par la cité. Cette sorte de pierre est très belle à voir, mais si on l’expose à l’humidité, à la pluie ou à la gelée, elle se consume et s’exfolie ; à l’abri elle dure indéfiniment.

Bien plus durable et d’une plus belle couleur est une pierre azurée qu’on appelle aujourd’hui la pierre del Fossato. Quand on l’extrait, le premier lit est plein de gravier et grossier, le second offre des nœuds et des fissures, le troisième est admirable, étant plus fin. Michel-Ange s’en est servi dans la bibliothèque et la sacristie de San Lorenzo, élevées pour le pape Clément, parce qu’il la trouvait jolie de grain. Les corniches, les colonnes et les autres parties qu’il en a tirées sont exécutées avec tant de soin, qu’en argent elles ne seraient pas plus belles. Cette pierre est susceptible d’un poli merveilleux, et l’on ne saurait désirer mieux dans ce genre. Aussi avait-on autrefois ordonné par une loi, à Florence, que cette pierre ne pourrait être employée que pour des édifices publics et qu’avec l’autorisation du gouvernement. Le duc Cosme a fait mettre également en œuvre beaucoup de cette pierre, tant pour les colonnes et ornements de la loggia di Mercato Nuovo, que pour la salle d’audience commencée par le Bandinello dans la grande salle du Palais, ainsi que pour celle qui est en face. Une quantité plus grande que celle qui a jamais été employée dans aucun autre endroit a servi, par ordre de Son Excellence, pour la salle des Magistrats qu’elle fait élever sur le dessin et sous la