Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/150

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l’emmener. Ils vinrent donc à Rome où Guillaume changea l’habit de saint Dominique contre celui de saint Pierre[1]. Bramante avait alors fait ouvrir deux fenêtres en travertin dans la salle du palais qui précède la chapelle, aujourd’hui embellie d’une voûte construite par Antonio da San Gallo, et aussi de stucs admirables de la main de Perino del Vaga, Florentin. Les vitraux furentpeints par maître Claude et par Guillaume, mais, tout admirables qu’ils étaient, ils furent détruits pendant le sac de Rome[2], afin d’en tirer les plombs pour faire des balles. Beaucoup d’autres verrières peintes par eux dans le Vatican subirent le même sort ; il en reste une cependant, dans la chambre de l’Incendie[3], peinte par Raphaël, dans la Tour Borgia, et qui représente des anges soutenant les armes de Léon X. Ils firent encore, à Santa Maria del Popolo, dans la chapelle derrière la Madone, deux fenêtres[4] avec des sujets tirés de la vie de la Vierge ; ces œuvres furent très admirées par les connaisseurs, et acquirent à leur auteur autant de profit que de gloire. Maître Claude, buvant et mangeant avec excès, ce qui est le défaut de sa nation et qui est une chose pernicieuse, à cause de l’air de Rome, devint malade d’une fièvre si violente, qu’en six jours il passa à une autre vie. Guillaume, resté seul et comme perdu par la mort de son compagnon, peignit sans aide une verrière à Santa Maria de Anima, église des Allemands à Rome ; elle fut cause que Silvio[5], cardinal de Cortona, lui fit des offres et tomba d’accord avec lui devenir faire cà Cortona, sa patrie, quelques verrières et d’autres travaux. Il l’emmena donc à Cortona, et la première œuvre que Guillaume y fit fut la façade de sa maison tournée vers la place, qu’il peignit en clair-obscur, et sur laquelle il représenta Crotone et les premiers fondateurs de cette ville. Le cardinal, reconnaissant que Guillaume était non moins bonne personne que grand maître dans son art, lui fit peindre, dans l’église paroissiale de Cortona, la fenêtre de la grande chapelle, sur laquelle il représenta la Nativité du Christ et l’Adoration des Mages[6].

Guillaume avait bon esprit, du génie, une très grande pratique de la peinture sur verre, particulièrement dans la manière de ménager les

  1. Par un bref du 19 octobre 1509, Jules II l’autorise à sortir du couvent des Dominicains de Nevers et à prendre l’habit de saint Benoît ou celui des chanoines réguliers de Saint-Augustin.
  2. En 1527.
  3. Incendie du Bourg.
  4. Qui existent encore.
  5. Passerini. Guillaume est à Cortona en 1517.
  6. Actuellement dans une maison particulière à Cortona.