Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/189

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ner des peintures excellentes, il donna à peindre à Andrea un tableau d’un Christ mort et soutenu par des Anges, qui d’un air triste et plein de pitié contemplent le Sauveur, tombé dans une telle misère pour racheter les péchés des hommes[1]. Cette œuvre, une fois terminée, plut universellement, en sorte qu’Andrea, prié par plusieurs, la fit graver à Rome par Agostino Veneziano ; mais, comme elle ne réussit pas trop bien, il ne voulut plus jamais donner quelque œuvre à faire graver. Le tableau fut envoyé en France, où il ne plut pas moins qu’aux Florentins, si bien que le roi, toujours plus désireux d’avoir de ses œuvres, lui en demanda, ce qui fut cause qu’Andrea, persuadé par ses amis, se décida à se rendre peu après en France.

À cette époque, c’est-à-dire l’an 1515, les Florentins, ayant appris que le pape Léon X voulait leur faire la grâce de se montrer dans sa. patrie[2], préparèrent, pour le recevoir, les fêtes les plus somptueuses ; ils disposèrent des arcs de triomphe, des façades, des temples, des statues colossales et d’autres décorations avec une telle profusion et une telle magnificence, que l’on n’avait encore rien vu de plus beau. Il est vrai que jusqu’alors Florence n’avait jamais possédé dans son sein autant d’artistes de talent. À l’entrée de la Porta San Pier Gattolini, Jacopo di Sandro et Baccio da Montelupo construisirent un arc de triomphe tout historié. Giuliano del Tasso en fit un autre à San Felice in piazza, ainsi que plusieurs statues à Santa Trinità, et une copie de la Colonne Trajane sur le Mercato Nuovo. Antonio, frère de Giuliano da San Gallo, éleva un temple octogone sur la Piazza de’Signori, et Baccio Bandinelli une statue colossale sur la Loggia. Entre la Badia et le palais du Podestat, le Granacci et Aristotile da San Gallo bâtirent un arc de triomphe, et au Canto de’Bischeri, le Rosso en plaça un autre, remarquable par la beauté de l’ordonnance et la variété des figures. Mais ce que l’on admira surtout, ce fut la façade en bois de Santa Maria del Fiore, qu’Andrea peignit en grisaille avec tant de perfection, que l’on n’aurait pu désirer mieux. Elle avait été construite en bois par Jacopo Sansovino, qui l’avait également enrichie de bas-reliefs et de statues, en sorte que le pape déclara que cet édifice n’aurait pas été plus beau, lors même qu’il eût été en marbre. C’était une invention de Laurent de Médicis, père de Léon X, quand il était vivant. Jacopo Sansovino fit encore, sur la place de Santa Maria Novella, un cheval semblable à celui de Rome. Une multitude d’ornements couvraient la salle du Pape,

  1. Musée de Vienne, signé : AND. SAR. FLO. FAC.
  2. Il vint le 14 novembre 1512.