Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/356

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qui lui tend des flûtes, pour qu’il en joue, dans un très beau paysage ; ce tableau est aujourd’hui à Faenza, dans la maison de Giovanni[1]. Il peignit ensuite, pour le maître-autel de l’église des Mineurs, appelée la Ca Grande[2], un tableau de l’Assomption de la Vierge, et dans le bas les douze Apôtres, qui la regardent monter au ciel[3]. Mais, comme cette peinture est sur toile, et mal conservée, on la voit peu. Dans la chapelle de la famille Pesari de la même église, il fit un tableau de la Vierge tenant l’enfant Jésus, et accompagnée de saint Pierre, de saint Georges et des donateurs agenouillés[4] ; parmi ces derniers, on remarque l’évêque de Baffo et son frère, alors de retour de la victoire que l’évêque venait de remporter sur les Turcs. Dans la petite église de San Niccolo du même couvent, il représenta, sur un tableau, l’Enfant Jésus porté par la Vierge que contemplent saint Nicolas, saint François, sainte Catherine et un saint Sébastien nu, dont les jambes et le toree sont pour ainsi dire calqués sur nature[5]. D’après cette composition, Titien traça sur bois un dessin qui fut gravé et tiré par d’autres[6]. Il fit ensuite, pour l’église San Rocco, sur un panneau, le Christ, l’épaule chargée d’une croix et le cou entouré d’une corde que tire un Juif[7] ; ce tableau, que plusieurs personnes ont cru être de la main de Giorgione, est aujourd’hui l’objet sacré le plus vénéré de Venise, et a valu à l’église plus d’aumônes que Titien et Giorgione n’ont gagné d’écus dans tout le cours de leur vie.

Ayant été ensuite appelé à Rome par le cardinal Bembo, secrétaire du pape Léon X, dont il avait fait le portrait, et qui voulait lui faire connaître Rome, Raphaël d’Urbin et les autres maîtres, il remit ce voyage de jour en jour, si bien que le pape Léon X et Raphaël étant morts l’an 1520, la chose ne se fit pas. Pour l’église de Santa Maria Maggiore[8], il peignit, sur un tableau, un saint Jean-Baptiste dans le désert, au milieu de rochers ; un ange qui paraît vivant, et un morceau de paysage lointain, avec de beaux arbres, sur la rive d’un

  1. Tableau dit les Trois Ages, l’original est chez Lord Ellesmere, à Londres ; une copie ancienne au palais Doria, à Rome.
  2. Appelée communément l’église des Frari.
  3. À l’Académie de Venise.
  4. Ce tableau est en place ; 1519, payé 96 ducats.
  5. À la Pinacothèque du Vatican, signé : TITIANUS. F.
  6. Par Andrea Andreani.
  7. Tableau en place.
  8. Église supprimée de Venise.