Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/377

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

celui de ce dernier fut préféré par le pape, pour avoir, conformément au plan que l’on voit dans le second livre d’architecture de Sebastiano Serlio^ projeté de placer une tribune à chacun des quatre angles de l’édifice, et une plus grande au milieu. Tous les chefs de la nation florentine s’étant rangés à l’avis du pape, on commença à jeter les fondations de l’église qui devait avoir vingt-deux cannes de longueur. Comme on voulait que la façade fût sur l’alignement des maisons de la Strada Giulia, le terrain se trouva insuffisant, et l’on fut forcé d’empiéter de quinze cannes sur le lit du Tibre. Cela plut à beaucoup de gens, comme étant plus coûteux et grandiose de jeter les fondations dans l’eau ; on commença donc le travail qui nécessita une dépense de plus de quarante mille écus, qui auraient suffi à faire la moitié de la bâtisse. Sur ces entrefaites, Jacopo, directeur de la construction, en surveillant les travaux de fondation, fit une chute et se blessa grièvement ; obligé de se faire porter à Florence pour se guérir, il laissa à Antonio da San Gallo le soin de terminer les fondations. Mais la mort, en frappant Léon X, enleva à la nation florentine son principal appui, et l’exécution de l’église resta suspendue durant le règne entier d’Adrien VI ; enfin, sous Clément VII, Sansovino fut rappelé pour suivre le plan initial. Il se remit donc à l’œuvre, et entreprit en même temps le tombeau du cardinal d’Aragon et celui du cardinal Aginense. À ce moment il était pour ainsi dire maître de Rome, les seigneurs lui confiaient les travaux les plus importants, trois papes l’avaient honoré de leur faveur, et Léon X, entre autres, l’avait nommé chevalier de Saint-Pierre, dignité qu’il vendit pendant sa maladie. Déjà il avait commencé à sculpter les ornements et achevé les modèles des figures destinées aux tombeaux des deux cardinaux, lorsque Dieu, pour châtier Rome et abaisser l’orgueil de ses habitants, permit que le connétable de Bourbon livrât cette ville au pillage, le 6 mai 1527. Ce désastre contraignit Jacopo à s’enfuir de Rome et à se réfugier à Venise, pour de là passer en France, où depuis longtemps le roi l’avait invité à se rendre. Mais le prince Andrea Gritti le détermina à se fixer à Venise ; précisément, peu de jours auparavant, le cardinal Domenico Grimani lui avait fait entendre que le Sansovino se trouvait à point à Venise, pour restaurer les coupoles de l’église Saint-Marc qui, à cause de leur vétusté, de la faiblesse des fondations et de la mauvaise construction de leurs chaînages, s’étaient ouvertes et menaçaient ruine. Gritti le fit donc appeler, et, après de longues pntrevues, lui fit accepter la tâche d’éviter la ruine entière des coupoles. Il en garnit d’abord l’intérieur de solides armatures en bois, puis il les entoura, en dehors, d’un cercle en fer, en