autre coin ; on y voit le corps d’Holopherne privé de sa tête que Judith jette dans un panier posé sur la tête d’une vieille servante qui, étant grande de sa personne, se baisse afin que Judith puisse l’atteindre. Tandis que celle-ci va recouvrir la tête, elle tourne la tête vers le corps qui, un bras et une jambe en l’air, paraît faire du bruit dans la tente, et elle montre dans son attitude la crainte de l’alarme au camp et la peur de la mort ; peinture vraiment admirable. Plus belle et plus divine encore non seulement que cette peinture, mais encore que toutes les autres, est l’histoire du serpent de Moïse, qui est au-dessus du coin gauche de l’autel ; on y voit les Hébreux assaillis par des serpents qui les mordent et les piquent, tandis que Moïse a posé le serpent d’airain sur un bûcher. Privés d’espérance, ils cherchent à échapper aux morsures et ils s’enlacent de manière à rendre tout mouvement impossible ; les uns crient et d’autres se désespèrent, à demi-renversés. Non moins beaux sont ceux qui, regardant le serpent d’airain, sentent leurs douleurs s’apaiser et, revenant à la vie, le contemplent avec une suprême reconnaissance ; il y a surtout une femme qui est soutenue par un homme, de manière que l’on reconnaît parfaitement le désir de l’homme qui le pousse à l’aider, et le besoin d’assistance qu’elle éprouve dans un pareil tourment. Enfin, dans la quatrième histoire, où Assuérus, étant au lit, lit les annales de son règne, il y a des figures très belles ; à côté, trois personnes à table représentent l’assemblée, à la suite de laquelle le peuple juif fut délivré et Aman mis en croix. Ce dernier présente un raccourci extraordinaire ; le tronc qui soutient sa personne et le bras qui vient en avant paraissent non pas peints, mais réels et en relief, de même que la jambe qu’il jette en avant et d’autres parties du corps qui sont en arrière, figure certes difficile et admirable, entre les plus difficiles et les plus belles. Mais il serait trop long de décrire toutes les fantaisies et les sujets différents représentés, ainsi que toute la série des patriarches, en commençant aux fils de Noé, pour exprimer la généalogie du Christ. On ne saurait montrer la diversité qu’on y remarque dans les visages, les têtes, les draperies, l’infinité de caprices nouveaux et extraordinaires et judicieusement composés. Dans tout l’ensemble, il n’y a pas de point qui ne soit à sa place et toutes les figures sont représentées avec des raccourcis si beaux et si savants que c’est une chose vraiment divine. Qui n’admirera pas et ne restera pas stupéfait en voyant l’aspect terrible de Jonas, dernière figure de la chapelle ? Elle fait que la voûte, par la puissance de l’art, paraît droite, au lieu de venir en avant, par sa concavité naturelle, parce que cette figure se renverse en arrière ; de même que, grâce au dessin, aux ombres et aux
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