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de Fernand Mendez Pinto.

mat qu’on euſt iamais veu, auec vne grande quantité de beſtial. Il y auoit auſſi pluſieurs belles & grandes campagnes, ſemées de bled, riz, orges, millets, & de toute autre ſorte de legumes & ſemences : ce qui nous eſtonna tous ; ioint qu’en certains endroicts il y auoit auſſi de fort grands bocages de pins, & d’arbres d’Angelin, comme aux Indes, leſquels pouuoient fournir vne grande quantité de Nauires. Dauantage par le rapport de quelques Marchands, deſquels Antonio de Faria s’informa, il ſceut qu’il y auoit en ces lieux beaucoup de mines de cuiure, d’argent, d’eſtain, de ſalpetre & de ſoulphre, auec force campagnes en friche, dont la terre eſtoit extrémement bonne, & ſi negligée par ceſte foible nation, que ſi elle eſtoit ſoubs noſtre pouuoir, peut-eſtre que nous ſerions plus aduancez aux Indes que nous ne ſommes pas à preſent par le malheur de nos pechez.




Comme nous nous perdiſmes dans l’Iſle des Larrons.


Chapitre LIII.



Apres auoir eſté ſept mois & demy en ceſte contrée, tantoſt d’vn coſté, tantoſt d’vn autre, de riuiere en riuiere, & aux deux coſtez du Nord & du Sud, comme auſſi en l’Iſle d’Ainã ſans qu’Antonio de Faria pût auoir aucune nouuelle de Coia Acem, les Soldats ennuyez d’vn ſi long trauail, s’aſſemblerent en vn corps, & le prierent de leur faire part de ce qu’il auoit gaigné, ainſi qu’il leur auoit promis par vn mot d’eſcript qu’il leur auoit ſigné de ſa main, diſant, qu’auec cela ils vouloient s’en aller aux Indes, ou ailleurs où bon leur ſembleroit, ce qui eſmeut entr’eux beaucoup de faſcheux differents. A la fin ils s’accorderent d’aller hyuerner à Siam, où l’on vendroit la marchandiſe qu’ils auoient dans le Iunco, & qu’apres qu’elle ſeroit toute reduitte en or, l’on en feroit le partage, comme ils deſiroient. Auec cét accord iuré, ſigné de tous, ils s’en allerent anchrer en vne Iſle, nommée l’Iſle des Larrons, pour eſtre la plus eloignée de ceſte anſe, afin que de ce lieu-là ils