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de Fernand Mendez Pinto.

l’vn & l’autre, à ſçauoir le Iuif content & ſatisfait d’eux, & moy en pleine liberté comme auparauant.




De ce qui m’aduint depuis que ie m’embarquay à Ormuz, iuſques à mon arriuée aux Indes.


Chapitre VII.



Me voyant par la miſericorde de Dieu déliuré des trauaux que ie viens de dire, apres que i’eus ſeiourné dix-ſept iours à Ormuz, ie m’embarquay pour m’en aller aux Indes dans le Nauire d’vn nommé George Fernandez Taborda, qui s’en alloit à Goa mener des cheuaux. En la route que nous priſmes nous fiſmes voile auec vn vent ſi fauorable, qu’en dixſept iours nous arriuaſmes à la veuë de la fortereſſe de Diu. Là coſtoyãt la terre, par l’aduis des Capitaines, pour taſcher d’apprendre quelques nouuelles, toute cette nuict nous viſmes le long de la coſte vn grand nombre de feux. Par fois auſſi nous oyons tirer pluſieurs coups d’artillerie ; ce qui nous meit fort en peine, à cauſe que nous ne pouuiõs nous imaginer ce que cela pouuoit eſtre, & pourquoy l’on tiroit ainſi de nuit : tellement que cette veuë extraordinaire fiſt naiſtre parmy nous des opinions toutes differentes. Durant cette incertitude, tout ce que nous aduiſaſmes pour le mieux, fût de nauiger le reſte de la nuict, nos voyles à demy baiſſées, iuſqu’à ce que le lendemain matin à la faueur du iour, nous apperceuſmes vne grande quantité de voiles Latines, qui entouroient toute la fortereſſe. Quelques-vns nous aſſeuroient au vray que c’eſtoit l’arriuée du Gouuerneur, nouuellement venu de Goa, pour faire la paix de la mort du Soultan Bandur, Roy de Cambaye, qui vn peu de temps auparauant auoit eſté tué. D’autres aſſeuroient que c’eſtoit l’Infant du Roy Dom Louys, frere du Roy Dom Iouan III. là nouuellement arriué de Portugal, & que les voiles Latines qui s’y voyoient en grand nombre, eſtoient les Carauelles qui l’a-