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de Fernand Mendez Pinto.

en vne petite Iſle nommée Apeſingau, eſloignée d’vne lieuë & demie de l’emboucheure, & peuplée de pauures gens, qui ne viuent que de la peſche qu’ils font des aloſes, encore n’en peuuent-ils garder que les œufs des femelles, à faute de ſel, comme aux riuieres d’Auru & de Siaca, de l’autre coſté de la mer Méditerranée.




Des choſes qui ſe paſſerent à mon arriuée au Royaume de Queda, en la coſte de la terre ferme de Malaca, & de ce qui m’aduint außi durant le ſeiour que i’y fis.


Chapitre XIX.



Le lendemain matin, partis que nous fuſmes de ceſte Iſle de Fingau, nous couruſmes la coſte de la mer Oceane, vingt-cinq lieuës durant, iuſques à ce que nous embouchaſmes en fin le détroit de Minhagaruu, par où nous eſtions entrés ; puis paſſans la cõtre-coſte de cette autre mer Mediterranée, nous continuaſmes noſtre route le long d’icelle, & arriuaſmes en fin pres de Pullo Bugay : là nous trauerſaſmes la terre ferme, paſſant par le port de Iunçalan, nauigeaſmes deux iours & demy auec vn vent fauorable. En ſuite de cela ayant gaigné la riuiere de Parles, au Royaume de Queda, nous y fuſmes cinq iours à l’anchre, en attendant que le vent fuſt propre pour paſſer outre. Pendant ce temps-là, le Mahometan & moy, par le conseil de quelques Marchands du païs, nous nous en allaſmes viſiter le Roy auec vn Odiaa, ou preſent de pluſieurs choſes conuenables à noſtre deſſein, qu’il receut auec de grandes demonſtrations d’en eſtre content. Comme nous fuſmes arriuez en ſa Cour, nous treuuaſmes qu’auec vn grand appareil, accompagné de belle Muſique, de dances, de cris d’allegreſſe, & de quantité de pauures, auſquels il donnoit à manger, il faiſoit ſolemnellement la pompe funebre de ſon pere, que luy-meſme auoit poignardé, en intention d’eſpouſer sa propre mere, apres l’auoir engroſſée. Dequoy