Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/405

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nom ni ma qualité ; j’en reçus un accueil auquel je ne m’attendais pas. Je ne sais ce qui prévint en ma faveur un prince qui ne devait pas faire profession de générosité ni de courtoisie ; mais enfin, après m’avoir retenu plus longtemps que je n’eusse voulu dans une cour où l’on me rendait les mêmes honneurs qu’à lui, il fit ce qu’il put pour m’arrêter par celui de son alliance, en m’offrant sa fille unique, princesse qui paraissait avoir autant de penchant pour le mariage que sa figure en donnait d’éloignement. Sa personne était toute contrefaite, et ses petits yeux m’avaient annoncé sa bonne volonté longtemps avant la proposition de son père : mais j’eus en horreur l’alliance d’un usurpateur ; et, sans me vanter, ce fut avec assez de hauteur que je rejetai son offre, et que j’envoyai promener sa petite bossue.

« Je sortais de la Circassie, lorsque le hasard me conduisit dans un vieux château, superbe à la vérité, mais que je crus d’abord inhabité, car je fus longtemps sans y rencontrer personne. Ceux qui demeuraient dans ce sombre séjour se renfermaient chacun dans son particulier, et semblaient s’éviter avec soin, lorsqu’ils en sortaient. Je fus surpris d’une coutume si sauvage, car il me parut qu’il n’aurait tenu qu’à eux de se désennuyer en s’humanisant les uns avec les autres.

« Je cherchais à qui parler pour m’en rendre raison, lorsque j’entrai dans un appartement assez propre. Il n’y avait pas une âme ; cependant j’y vis une table, des cartes, des jetons et des chaises rangées autour.

« Un moment après, arrivèrent quatre pies, chacune suivie d’un sansonnet qui lui portait la queue ; une corneille assez sérieuse les accompagnait.