Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/415

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me prendre pour la regarder tout à leur aise. Je ne veux point ici parler des transports de joie que je sentais aux innocentes caresses qu’elle me faisait. Mille occasions, dont je tairai les circonstances, me tinrent ce que la sorcière m’avait promis. Ce fut sous ma figure de perroquet que je fus trop payé, auprès de Luisante, des horreurs que la tendresse de la sorcière m’avait inspirées. Enfin, j’ai commencé sous cette figure à plaire aux plus beaux yeux du monde : trop heureux si celle que j’ai reprise lui pouvait être aussi agréable ! »

Le beau Phénix cessa de parler ; et, quoique Luisante eût rougi plus d’une fois sur la fin de son discours, ses beaux yeux ne laissèrent pas de l’assurer qu’il ne perdait rien à n’être plus perroquet.

Le calife trouva les aventures de son gendre assez divertissantes : il lui sut bon gré de n’avoir point voulu do la princesse bossue qu’on lui avait offerte en Circassie. « Mais, seigneur Phénix, lui dit-il, mettez la main à la conscience ; si par bonheur on ne vous eût changé en perroquet, n’eussiez-vous pas plutôt épousé la sorcière, sa mère, sa grand-mère, et toutes les Dentues du monde, que de vous laisser égorger comme un sot ? Pour moi, je suis peut-être aussi délicat qu’un autre ; mais, après tout, il n’est que de vivre. Ne parlons plus de ce que vous eussiez fait ; j’espère, au moins, que le royaume de Cachemire que vous aurez quand je n’en voudrai plus, et la main de Luisante que vous avez dès à présent, vous dédommageront un peu du refus que vous avez fait de l’infante de Circassie.

« À l’égard de votre frère Pinson, quoiqu’il ne soit pas si