Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/422

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aussi bien qu’au plus fidèle. Je connus qu’il fallait ces deux qualités à celui qui enlèverait la jument et le chapeau de la sorcière ; mais je ne savais où trouver un homme de ce caractère.

« Dans ce temps-là, Luisante vint au monde ; et mes livres, que je consultai sur sa naissance, m’ayant appris ce que ce devait être un jour que cette beauté, je fis répandre une contagion secrète sur l’éclat naissant de ses yeux, bien assurée qu’on aurait recours à moi pour y remédier, et fort résolue de ne le faire qu’à condition qu’on me livrerait Fleur d’Épine avec les trésors de la sorcière.

« La curiosité de Tarare l’avait heureusement conduit chez moi avant que de se rendre à la cour ; et ce que je découvris de son esprit et de ses sentiments me fit espérer que s’il osait tenter l’aventure, il ne serait pas indigne d’y réussir. J’en eus encore meilleure opinion lorsque je le vis revenir, à quelque temps de là, pour me consulter : je ne le vis point embarrassé des choses que je proposai pour prix du secours qu’on me demandait, quoique j’en eusse étalé tout le danger. Et, lui ayant demandé s’il connaissait quelqu’un d’assez téméraire à votre cour pour rendre service à la belle Luisante à ce prix : « Il ne faut, dit-il, que beaucoup d’ambition ou beaucoup d’amour pour l’entreprendre ; et l’espérance seule d’en être avoué de vous suffît pour tout oser sans autre motif que celui de la gloire. »

« Je ne vous dirai point la joie que me donna cette réponse d’un homme que je commençais à beaucoup estimer : je ne doutai point que ce ne fût lui que les destinées avaient marqué pour le libérateur de Fleur d’Épine.

« Je lui fis espérer que je ne lui serais pas contraire s’il