Page:Leskov - Le Voyageur enchanté.djvu/327

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— Vous aussi ?

— Moi aussi ; il me faisait souvent de vilaines farces ; il abîmait mon costume ; au foyer, pendant que nous étions en train de nous chauffer et de boire du thé, il se glissait tout doucement derrière moi et accrochait ma queue à mes cornes, ou imaginait quelque autre niche semblable ; je ne m’apercevais de rien ; j’entrais en scène comme cela, et le directeur me mettait à l’amende. Pour tout ce qui me touchait personnellement, je prenais patience, mais cet odieux bouffon s’avisa soudain de molester une fée. C’était une toute jeune fille appartenant à une famille de gentilshommes pauvres ; elle représentait chez nous la Fortune et devait sauver le prince de mes mains. Le costume de son rôle ne se composait que d’une tunique de tulle avec des ailes, il gelait à pierres fendre, la pauvrette avait ses menottes toutes bleues, tout engourdies, et il ne cessait de la tarabuster ; à l’apothéose, quand nous descendîmes à trois dans le sous-sol, il se permit même de la pincer à travers son léger