Page:Lesueur - À force d'aimer, 1895.djvu/241

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
237
à force d’aimer

répondit René à celle qu’il savait sa sœur. « Quand je me représente une créature parfaitement belle et séduisante, c’est toujours « Germaine » que je la nomme inconsciemment.

— Tu entends ? » dit Mlle  Vallery à son amie.

Comme René prit un air voulu d’étonnement, le ministre expliqua :

— « C’est le nom de ma fille. »

Et le jeune auteur s’inclina sans se résoudre à la banalité d’aucune parole.

Les deux hommes échangèrent alors quelques mots sur les théories socialistes qui faisaient le fond de la pièce. La courtoisie rendit leur conversation tout à fait indifférente. Ils se dédaignaient trop mutuellement pour être sincères l’un avec l’autre. René n’avait serré la main de ce parvenu de la politique et n’était entré dans cette loge que par l’irrésistible désir d’approcher les deux créatures de mystère et de beauté qu’étaient pour lui sa sœur et l’amie de celle-ci. Quant à M. de Percenay, il avait attiré le jeune socialiste dans l’intention inconsciente d’exercer sur lui la corruption légère d’un contact avec le luxe et la puissance. Dix minutes de cette atmosphère suffiraient peut-être à troubler d’une vapeur de doute le cerveau de vingt-cinq ans qui avait conçu La Force inconnue.

Sans doute le ministre aurait cru à quelque défaillance de ce genre, s’il avait vu René Ma-