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Page:Lesueur - À force d'aimer, 1895.djvu/291

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à force d’aimer

« Vais-je causer la mort du fils comme j’ai causé celle de la mère ?… »

Une image rapide lui représenta ce beau René, si ardent, si jeune, étendu, tout pâle, avec du sang sur ses habits. Aussitôt elle se confondit, cette image, avec une autre : celle d’Hélène, la tête renversée, un filet rouge sur la blancheur de sa joue. Horace eut un gémissement qui se transforma tout de suite en une exclamation exaspérée :

— « Damnation !… Comment Chanceuil et lui se sont-ils trouvés face à face ? L’histoire des journaux est absurde. Mais qu’y a-t-il au juste là-dessous ? »

Le directeur de l’Avenir social prit son chapeau et sortit.

— « Qu’on apporte les épreuves chez moi, rue Montaigne, et qu’on m’attende pour le tirage. »

À l’appartement, le bruit de sa clef dans la serrure fit sortir René de la bibliothèque.

— « Je vous demande pardon, mon cher maître… J’ai deux amis…

— Tes témoins, n’est-ce pas ?

— Oui, mes témoins. »

Il y eut un reproche attristé dans les yeux du maître, une apologie respectueuse mais fière dans ceux du jeune homme.

— « Va les retrouver, » dit Horace. « Puis tu viendras dans ma chambre, quand ils seront partis. »