Page:Lesueur - Nietzscheenne.djvu/10

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C’est pourquoi je m’en explique en publiant cette nouvelle édition.

On a prétendu que tout se trouve dans Nietzsche, et que c’est un auteur plein de contradictions.

Il est toujours facile de torturer des textes, surtout dans les derniers écrits d’un homme que la folie, — cette fréquente rançon du génie, — guettait, comme tant d’autres doués d’un cerveau supra-humain.

Mais je défie qu’on découvre, même dans les pages hallucinées de sa fin, des démentis à la noble doctrine dont j’ai nourri mon livre, ou aux citations dont je fais suivre cet avant-propos.

Trop courtes sont-elles, ces citations !…

C’est par chapitres entiers que Nietzsche a montré sa prescience écœurée du caractère allemand. On croirait entendre encore le jugement dont Tacite a flagellé la Germanie. Aujourd’hui, après les révélations d’une mentalité dont l’Allemagne épouvanta le monde, après les horreurs de la guerre sans nom, les deux écrivains, à vingt siècles de distance, se rencontreraient encore : le Latin de race et le Latin de cœur. Ils ne pourraient raturer une épithète, ni en ajouter une de plus. Nietzsche a cette supériorité qu’il fut un prophète. Tacite avait vu, et n’était qu’un historien.

Nietzschéenne… Faible cri d’oiseau avant la tempête.

Mais la clameur formidable de Nietzsche !… Ah !… si nous l’avions entendue !…


Daniel-Lesueur.