eu besoin de me rassurer. Cela est bien naturel ; mais cela est affligeant. Mon ami, je ne vous fait point de reproche : je vous plains seulement, quelle que soit votre situation, que le retour de votre âme ne soit pas pour moi. Adieu. Je suis abattue, et dans un état de faiblesse qui est extraordinaire : il me faut un effort pour tenir ma plume. Je n’attendrai plus de vos nouvelles ; mais j’en désirerai tant que je respirerai.
LETTRE LXVI
Ah ! j’ai été injuste ; ce serait un tort avec tout le monde ; mais je me le reproche comme un crime avec vous. Pardonnez-moi, mon ami : je devais vous rendre grâce, et je vous ai accusé. Cette pensée me fait mal, comme si j’étais coupable ; cependant c’est la poste qui l’a été, et je le soupçonnais si peu, que, lorsqu’on m’a donné mes lettres aujourd’hui, je ne regardais seulement pas le dessus, tant il m’était égal par où je commencerais ou par où je finirais. Mon ami, à la seconde lettre que j’ai ouverte, j’ai fait un cri : c’était votre écriture ; j’en ai eu un battement de cœur. Si c’est un mal bien douloureux que d’attendre sans voir venir, c’est un plaisir bien vif et bien sensible que d’être ainsi surprise. Mon ami, je vous aime à la folie ; tout me l’apprend, tout me le prouve, et souvent bien plus que je ne voudrais. Je vous donne plus que vous ne voulez : vous n’avez pas besoin d’être autant aimé, et moi j’avais besoin de me reposer,