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Page:Lettres de Mlle de Lespinasse (éd. Garnier).djvu/262

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donné lieu : je vous dirai comment. J’ai vu M. Turgot qui m’a dit qu’il se reprochait de ne vous avoir pas répondu : il a été très flatté de votre lettre. Il en a reçu une charmante de Voltaire, qui lui dit, vous serez accablé de compliments vrais, etc. — J’ai fait demander à madame de Luxembourg quel jour revenait madame de Boufflers ; c’est lundi. Je n’ose pas me flatter de dîner demain avec vous : mais je ne puis m’empêcher de le désirer, quoique ce soit peut-être un vœu contre votre plaisir. Si vous avez été chez le comte de Broglie, mon ami, il est bien mal de ne pas m’avoir donné un moment ; vous êtes cause que je n’ai écouté l’archevêque d’Aix qu’avec distraction : je vous attendais, comment pouvais-je être à lui ? Bonsoir. Je sens que l’abbé de B… a raison, mais il a tort de me le dire. J’ai vu vingt personnes aujourd’hui, et elles n’ont pu me distraire du besoin que j’avais de vous voir. Qu’avez-vous fait ? où avez-vous soupé ? vous êtes-vous souvenu que je vous aimais ? pouvais-je dire au moins comme dans Oreste, le cœur est pour Pyrrhus, et les vœux pour Oreste. Mais adieu. Je ne veux que la vérité : songez encore une fois que vous me la devez sans détour, sans modification, telle enfin qu’elle est dans votre âme.



LETTRE XCVIII

Samedi, onze heures, 1775.

Je ne m’y attendais pas : j’avais au fond de l’âme l’impression douloureuse de ces cruels mots : nous ne pouvons pas nous aimer, et j’y répondais avec toute