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JE SAIS TOUT

— Ma foi, monsieur, c’est bien possible…

— Vous avez eu tort. À l’avenir, vous voudrez bien vous abstenir de tenir les gens au courant de mes faits et gestes.

— Bien, monsieur.

— Et à qui avez-vous dit cela ?

— À M. Fortier.

— En quoi cela peut-il intéresser M. Fortier, que je connais à peine ?

— Ce monsieur me demandait des nouvelles de monsieur. Je lui ai parlé de cela comme je lui aurais parlé d’autre chose, mais du moment que cela contrarie monsieur…

— Cela ne me contrarie pas, corrigea Philippe d’un ton plus doux. Je n’ai rien à cacher à personne… mais je n’ai pas, davantage, de confidence à faire à qui que ce soit… Je pars quand il me plaît ; je reste où il me convient, et je ne veux pas être obligé, parce que j’ai changé d’avis, de donner des explications à Pierre ou à Paul.

Il remonta dans sa chambre, jeta son chapeau sur son lit, s’accouda à la fenêtre et réfléchit. Il éprouvait le besoin de mettre un peu d’ordre dans ses idées ; sa brusque résolution de rester succédant à sa résolution non moins brusque de partir, le surprenait. Encore savait-il quelles raisons le poussaient à quitter le pays, tandis qu’il ne démêlait pas celles qui venaient de le conduire à modifier ses plans. Il trouva d’abord une explication assez simple, et logique, en somme : par courtoisie, il avait voulu déposer sa carte à la Roche-au-Roi, puis le hasard l’avait conduit sur la route de M. Chanteleu ; par courtoisie toujours, il l’avait invité à dîner… Et voilà. L’explication ne tarda pas à lui paraître incomplète. Quelque chose de plus qu’un devoir de politesse le retenait. Il regarda la tache rouge que la toiture de la Roche-au-Roi