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LES SOURCES DE LA PENSÉE DE NOVALIS

versité, il est un étudiant plein d’entrain, léger et mobile, qui fait des dettes, qui a des amourettes, qui se flatte d’être un brillant cavalier. Mais le fond religieux de sa nature se révèle de bonne heure par cette nostalgie vague de paix, d’harmonie, d’équilibre intérieur qui se manifeste chez lui. Il ne faudrait pas imaginer que ce soit la mort de sa fiancée qui ait amené chez lui une conversion. Bien auparavant déjà Novalis est chrétien conscient. Dès l’été de 1796 Frédéric Schlegel, rencontrant à Weissenfels son ami qu’il n’avait pas revu depuis l’époque de leur vie commune à Dresde, est frappé — jusqu’à l’exaspération même — par ce qu’il appelle « la bigoterie piétiste » de Hardenberg. C’est dire que l’élément chrétien de la nature de Novalis est dès ce moment distinctement visible pour tous. La mort de Sophie n’a fait que renforcer chez lui une disposition déjà existante.

Et ses amis romantiques sentent très bien la différence profonde qui les sépare, à cet égard, de Hardenberg. La plupart d’entre eux sont des dilettantes du christianisme plutôt que des chrétiens véritables. Frédéric Schlegel en particulier a passé par le nihilisme absolu. Le christianisme en tant que vérité historique et traditionnelle a, pendant de longues années, perdu toute espèce de valeur pour lui. Même au moment où, à la fin de 1798, il veut « créer » une religion, ce n’est pas, dans sa