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LES SOURCES DE LA PENSÉE DE NOVALIS

ciente. « Mon étude favorite, écrit-il en 1796 déjà, se nomme au fond comme ma fiancée, Sophie est le nom de celle-ci, Philosophie est l’âme de ma vie et la clé de mon moi le plus intime ».

Gardons-nous, bien entendu, de chercher chez Novalis un système de philosophie proprement dit. On ne saurait imaginer un contraste plus absolu que celui que présentent un penseur romantique tel que Hardenberg et un philosophe professionnel et systématique comme Fichte, par exemple. Chez l’un l’intelligence et la volonté prédominent d’une façon absolue. Chez l’autre c’est au contraire le sentiment qui l’emporte. La volonté manque de vigueur et n’est guère capable de l’effort prolongé qu’exige l’achèvement d’une œuvre de longue haleine. La pensée est souvent ondoyante et imprécise. Aussi bien Novalis n’hésitet-il pas à voir dans le savoir intellectuel une connaissance d’ordre subalterne, « un rêve du Sentiment, un Sentiment mort, quelque chose de grisâtre et de débile ». Il n’est d’ailleurs nullement un spécialiste de la philosophie. Il connaît assez mal l’œuvre de ses devanciers, même les plus illustres. Ses cahiers d’extraits montrent que, de Kant par exemple, il a dû lire le début de la Critique de la raison pure, probablement aussi la Métaphysique des mœurs, mais qu’en réalité il n’a guère connu le fondateur du criticisme que par des compte rendus