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LES SOURCES DE LA PENSÉE DE NOVALIS

Aussi bien Novalis proclame-t-il hautement ce qu’il lui doit. « C’est lui, écrit-il à Schlegel le 8 juillet 1796, qui m’a réveillé et qui, indirectement, entretient mon ardeur ». Et dans ses Fragments, il déclare que Fichte fait partie avec Baader, Schelling, Hülsen et Schlegel du « Directoire philosophique de l’Allemagne » : il en est le président et le « gardien de la constitution ».

Et pourtant rien ne serait plus faux que de voir en Hardenberg, un disciple immédiat de Fichte et de chercher dans les Fragments un système offrant des analogies avec le Système de la science. Entre un fanatique du système et de la logique comme Fichte et un impressionniste mystique comme Novalis, il y a, nous l’avons déjà noté, une radicale opposition de tempéraments. Et Novalis avait conscience de cette opposition : il se sentait rebuté en particulier par l’insuffisance du sens mystique et de l’instinct artistique chez Fichte. Il lui arrivait d’écrire à Schlegel : « Fichte est le penseur le plus dangereux que je connaisse : il vous retient comme en un cercle magique ». Il concédait bien que l’auteur du Système de la Science était peut-être « l’inventeur d’une manière toute nouvelle de penser ». Mais il estimait que l’inventeur n’était peut-être pas, sur son propre instrument, le virtuose le plus parfait qu’on pût rêver. Et il admettait « qu’il y aura des hommes qui sauront beaucoup mieux