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LA JEUNESSE DE NOVALIS

de lui un « anormal », de rééditer à son propos le thème rebattu de la parenté du génie et de la folie, d’expliquer son mysticisme comme un produit de la dégénérescence nerveuse et de jeter d’avance le discrédit sur ses idées en présentant le penseur comme un détraqué. Rien ne nous autorise à prétendre que le mécanisme psychique de Novalis ait été faussé d’une manière appréciable par des troubles morbides ayant leur source dans sa nature physique. Tout ce que je veux constater ici, c’est le fait indéniable qu’il porte, comme ses frères et sœurs, le poids d’une hérédité inquiétante, que son organisme renferme des germes de dissolution qui l’ont conduit de bonne heure à la mort. Ces conditions physiques ont eu évidemment une répercussion sur sa pensée. Mais dans l’état actuel de nos connaissances, c’est à peine si nous pouvons entrevoir dans quel sens s’est exercé leur action. Je ne chercherai donc pas à définir la personnalité ni à expliquer la pensée de Novalis par des considérations pathologiques. J’abandonne de parti pris cet ordre de recherches aux spécialistes qui possèdent en ces matières délicates des connaissances et une expérience pratique qui me font défaut. Et, après avoir signalé, comme il était indispensable, le fait qu’il y a eu probablement chez Novalis un élément morbide héréditaire, j’essaierai d’interpréter sa vie et son œuvre comme je le ferais pour une personne