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L’ŒUVRE POÉTIQUE DE NOVALIS

Frédéric Schlegel avait, dans ses Fragments de l’Athenœum émis cet aphorisme retentissant et paradoxal : « La Révolution française, le Système de la Science et Wilhelm Meister, sont les trois plus grandes idées directrices de ce siècle ». Et l’on constate en effet que si l’idéalisme fichtéen et la doctrine du subjectivisme absolu ont exercé une influence profonde sur la pensée des romantiques, ils ont trouvé, d’autre part, dans les Années d’apprentissage de Wilhelm Meister le type classique du roman, une forme d’art nouvelle dont ils ont profondément senti l’originalité puissante et l’exceptionnelle valeur poétique.

Dans un article de l’Athenæum, capital pour l’histoire du romantisme allemand, Schlegel analyse longuement le roman de Gœthe qui lui paraît avoir pour l’art moderne la même importance que les chefsd’œuvre de Sophocle pour le drame antique. Dans cette œuvre qui débute modestement comme une description de la vie de théâtre pour s’épanouir peu à peu en une étude profonde sur l’art de la vie et sur l’éducation de l’humanité, il note la profondeur symbolique et philosophique s’alliant à l’objectivité et au réalisme le plus vivant et le plus plastique ; — il signale l’ironie du poète qui semble en quelque sorte planer au-dessus de son œuvre et la contemple avec un sourire détaché sans la prendre tout à fait au sérieux ; — il reconnaît enfin un incompa-