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L’ŒUVRE POÉTIQUE DE NOVALIS

ques où s’exhale cette nostalgique tendresse pour la nature qui hante les habitants du Temple. Nous entendons les disciples s’entretenir de leur commune aspiration à une révélation plus intime de la nature et des voies divergentes, par lesquelles ils cherchent à s’élever aux suprêmes intuitions. Puis surgit, dans le temple devenu désert, la voix plaintive des choses, des collections — pierres ou métaux, animaux ou plantes que l’homme a arrachés violemment de leur lieu natal pour les grouper artificiellement en des vitrines de musées — qui pleurent la rupture de l’antique alliance et la folie de l’homme qui au lieu de rester un organe inspiré de la vie du Tout, « une voix accompagnatrice », s’est détaché du concert universel pour s’isoler égoïstement et exercer sur les choses une domination tyrannique. Plus loin nous voyons apparaître un groupe de Voyageurs : ils cherchent à travers le monde la trace du Peuple originel disparu, qui habitait la terre à l’âge d’or et s’efforcent de retrouver quelques débris du « sanscrit primitif », de la langue sacrée qui unissait jadis ces êtres royaux au monde supra terrestre. Et dans ces entretiens, dans ces effusions, dans ces élégies, nous voyons reparaître s’entrecroiser, se développer en mille variations, les thèmes déjà exposés plus haut, de la philosophie de la nature de Novalis. Le poète cherche à faire naître en nous par la musique pénétrante de son ly-