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L’ŒUVRE POÉTIQUE DE NOVALIS

Et son Ofterdingen dut paraître inachevé en 1802, par les soins de ses exécuteurs testamentaires, Tieck et Frédéric Schlegel.

Le roman de Novalis devait être, dans la pensée de son auteur, la réplique du romantisme aux Années d’apprentissage de Wilhelm Meister. Goethe avait montré son héros se détournant de la poésie pour s’orienter vers l’action utile et pratique. Hardenberg se proposait, ainsi qu’il l’écrivait à son ami Tieck, d’écrire « une apologie de la poésie ». Il avait, dans ses fragments philosophiques, montré l’évolution qui mène l’humanité de l’illusion dualiste à la conscience de l’Unité universelle, du règne de la nécessité au triomphe de l’amour et de la poésie. Dans son roman il entendait retracer cette même évolution, non plus cette fois au moyen de formules métaphysiques abstraites, mais sous une forme concrète, en parant ses conceptions d’un vêtement poétique, en les incarnant en des personnages vivants, en les exprimant à l’aide d’images symboliques, de fictions mythologiques.

La première partie nous montrait l’humanité encore plongée dans l’illusion dualiste. Ofterdingen nous y était présenté comme une personnalité semblable à tous les mortels qui vivent au sein du mirage terrestre, — emprisonné dans sa nature empirique, dans son corps particulier, dans son moi individuel, à peine averti çà et là par des rêves ou