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L’ŒUVRE POÉTIQUE DE NOVALIS

cieuse cupidité, avec son cortège de soucis infinis et de sauvages passions. Elle mine ainsi en secret le sol sous le posesseur et l’enfouit bientôt dans le gouffre qui s’ouvre sous ses pas, pour circuler de main en main et satisfaire de la sorte son penchant d’appartenir à tous ».

Ainsi le mineur ne va pas chercher l’or pour le posséder, mais au contraire pour le répandre partout et libérer ainsi le monde de la domination que le précieux métal fait peser sur lui. Et dans une poésie étrange et mystérieuse, Novalis, par la bouche du maître mineur nous conte le mythe alchimique de l’Or. En un château invisible, au centre de la terre où il est tombé « du fond des Océans profonds », réside le Roi des métaux, le Primat de la nature minérale, le fils glorieux et pur de la matière cosmique, de l’Eau-mère primitive. Il trône là, dans sa tranquille majesté, en rapport avec le monde des astres dont les sources limpides, ruisselant à travers la toiture du palais, viennent lui conter les merveilles. Un beau jour, cependant, sa royauté, d’abord cachée au plus profond de la terre, a été révélée aux hommes. Et ceux-ci, bientôt asservis par la séduction qui émane de l’Or se sont pressés, avides, autour du palais. Quelques-uns seulement — les mineurs — plus audacieux et plus avisés, ont formé le dessein de miner sa demeure, de mettre au jour sa retraite. S’ils réussissent, s’ils