Page:Lichtenberger - Novalis, 1912.djvu/211

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
209
L’ŒUVRE POÉTIQUE DE NOVALIS

les assises même du globe, les masses grandioses des montagnes, les océans tempétueux sont les témoins muets des convulsions formidables, des enfantements pleins d’horreur, parmi lesquels notre terre jaillit du chaos primitif et s’achemina peu à peu vers sa destinée. Le mineur passe ainsi sa vie au milieu des archives préhistoriques du monde. Il est selon la formule de Novalis, un « astronome à rebours », qui fouille les entrailles de la terre, tandis que l’astronome céleste explore les espaces infinis où gravitent les astres, — un voyant qui se penche sur les documents du passé le plus reculé de notre planète, tandis que l’autre essaye de déchiffrer le livre de l’avenir.

L’Histoire que personnifie le comte de Hohenzollern est la continuation de l’étude de la nature. L’Histoire véritable n’a rien de commun avec l’ouvrage médiocre du chroniqueur qui relate sans choix et au hasard des événements qu’il ne comprend pas, semblable à l’enfant qui voudrait décrire une machine ou au laboureur qui parlerait d’un navire. L’histoire ne devrait être écrite que par des vieillards sages et pieux, dont la propre histoire est close et qui se recueillent quelque temps encore dans l’attente de la mort. Eux seuls sont en état « d’observer l’enchaînement secret du passé et de l’avenir, de mélanger en de justes proportions l’espoir et le souvenir ». Entre leurs mains l’histoire est une puissance bénie