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CONCLUSION

bigoterie piétiste de son ami. Dans le petit groupe romantique d’Iéna on ne se gêne pas pour sourire de l’étrangeté de ses croyances mystiques et on le traite couramment de « visionnaire ». Schelling et Steffens, d’autre part, blâment son dilettantisme scientifique. Sa profession de foi politico-religieuse Europe ou la Chrétienté est vivement discutée devant l’aréopage romantique et finalement, sur l’avis de Goethe, jugée impropre à être publiée dans l’Athenæum. La première partie d’Ofterdingen même, paraît avoir été l’objet de critiques assez sévères de la part des amis à qui Novalis l’avait soumise.

Après la mort prématurée du jeune poète, on voit se former autour de lui une légende qui se propage rapidement dans le cercle de ses amis et de là dans le grand public. Hardenberg devient une sorte de Christ romantique, un « Saint-Novalis » selon le mot de Zacharias Werner, un médiateur poétique entre Dieu et l’humanité, un divin adolescent marqué de bonne heure du sceau de la mort, martyr de son amour pour cette fiancée que le destin lui arrache à la fleur de l’âge, consumé dès lors par la nostalgie de sa patrie céleste, vivant, sur cette terre déjà, dans une sorte de rêve lucide et dans la conscience exaltée d’une existence supérieure. Schleiermacher, dans la seconde édition de ses Discours sur la Religion, célèbre, à côté de