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CONCLUSION

Spinoza, « le divin jeune homme, trop tôt arraché à la vie, pour qui se changeait en art tout ce qu’effleurait le vol de sa pensée, pour qui l’univers se transfigurait en un vaste poème et qui, après avoir à peine préludé confusément sur sa lyre, mérite cependant d’être rangé parmi les poètes les plus accomplis, parmi les rares élus dont la pensée est aussi profonde que limpide ». On vante Novalis comme le grand restaurateur du platonisme dans la littérature et dans la science modernes. On lui prête le plan d’une vaste encyclopédie philosophique qui aurait embrassé l’universalité du savoir humain, et dont ses Fragments seraient la première ébauche. Son Ofterdingen est célébré comme une cosmogonie grandiose, une révélation mystique, une Bible nouvelle malheureusement inachevée. On compare son œuvre à « un temple égyptien aux proportions gigantesques, qui, s’élevant à peine de ses assises, s’est écroulé à demi et dont les ruines restent encore chargées d’hiéroglyphes ».

Il y a certainement dans cette légende romantique une part de vérité. Novalis a sans nul doute été un mystique ; il a fait effort pour prendre conscience de ses expériences intimes et pour les traduire soit à l’aide de formules philosophiques, soit au moyen de symboles poétiques. Mais il est faux qu’il ait été, dans la vie quotidienne, le rêveur