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CONCLUSION

suspect aux représentants de l’orthodoxie catholique. Rien de plus naturel d’ailleurs. Le mysticisme sans doute, est l’élément actif de la piété chrétienne ; mais c’est un fait connu que le mysticisme spéculatif a de tout temps confiné à l’hérésie. L’Église a condamné Scot Eriugène, et les frères du Libre Esprit, et les « spirituels » franciscains, et maître Eckart et combien d’autres ! Comment aurait-elle pu louer sans restrictions la piété d’un Novalis ! Ne nous étonnons donc pas si certains écrivains catholiques ont nettement marqué leurs réserves quant à la « sainteté » de Novalis. Ils saluent en Hardenberg un allié dans la lutte contre le matérialisme et l’indifférence religieuse ; ils approuvent sa critique de la Réforme et de la Révolution. Mais ils ne peuvent se dissimuler qu’il demeure, tout au fond de lui-même, irréductiblement rebelle à la discipline eclésiastique qui a précisément pour objet de contenir en de justes limites les suggestions de l’esprit mystique. Et pour cette raison aussi, son catholicisme reste sujet à caution. Eichendorff déjà reprochait à Novalis de proposer un remède purement illusoire pour guérir les maux qu’il signalait avec tant de force. Ce n’est pas ajoutait-il, un catholicisme théosophique sans dogmes et sans rites, sans hiérarchie et sans discipline, ce n’est pas une vague religion de la Nature et de la Beauté qui peuvent sauver l’homme moderne : seul le retour au catho-