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L’EXPÉRIENCE DE L’AMOUR ET DE LA MORT

psychique aurait cessé de fonctionner régulièrement. Par sa sympathie profonde pour toutes les choses humaines, par la joyeuse confiance avec laquelle il s’avance dans la vie, par son aptitude à s’adapter aux nécessités de l’existence, par sa facilité pour le travail scientifique, par sa bonne volonté à se mettre au courant d’un métier, par la conscience professionnelle dont il donne des preuves réitérées, il se différencie très nettement soit des illuminés piétistes, soit des romantiques anti-utilitaires, soit des rêveurs quiétistes. C’est un type humain rare sans doute, mais d’une réelle beauté. Et ses aventures intellectuelles, ses tentatives hardies pour porter la lumière en des régions inexplorées du moi, méritent je crois d’être suivies avec attention et sympathie.

III

La douleur de Novalis, à la mort de sa fiancée, fut immense. Nous en trouvons des témoignages émouvants soit dans ses lettres, soit surtout dans le journal intime qu’il commence le 31e jour après la mort de Sophie, et où il note avec une sincérité ingénue et touchante les phases diverses par lesquelles passe sa « résolution » mystique de rejoindre sa bien-aimée dans la tombe. La tristesse qui se marque dans ces pages célèbres est si profonde,