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L’EXPÉRIENCE DE L’AMOUR ET DE LA MORT

sais quelle perversion un peu morbide de l’instinct vital qui cesserait, chez lui, de s’insurger contre tout ce qui menace la durée de l’organisme et trouverait même un élément de volupté dans ce qui révolte d’ordinaire la sensibilité humaine ? Je ne me charge pas de le décider. Quoi qu’il en soit, d’ailleurs, cette sérénité qui dit « oui » à la vie, à ses douleurs et à ses illusions, est un trait essentiel du lyrisme de Novalis. Il n’y a en lui ni misanthropie, ni désespoir, ni révolte, ni défiance à l’égard de la destinée. Il va à travers l’existence comme à travers une féérie brillante, reconnaissant de tout ce qu’elle lui apporte de beauté et de joie, conscient d’ailleurs que cette fantasmagorie se dissipe peu à peu, plein du pressentiment radieux des réalités supérieures qu’il devine derrière le voile d’illusions où elles s’enveloppent. Et il s’achemine sans hâte vers le terme obscur de son pèlerinage, sachant qu’il rêve et que le réveil est proche…