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LES SOURCES DE LA PENSÉE DE NOVALIS

fable, le mystique voit jaillir peu à peu la Pensée et l’Univers. Il voit la Divinité se replier d’abord sur elle-même, prendre conscience d’elle en une Image qui est elle-même encore une fois, s’y mirer comme le Père en son Fils. Mais dans cette Image, dans cette Idée suprême, à son tour, sont contenues en puissance les idées génératrices de toutes choses. Imaginez maintenant que cette Image développe tout ce qu’elle contient en puissance, que tout ce qui est virtualité en elle devienne acte et vous aurez l’Univers, le monde des hommes et des choses. En vertu de la loi de Bonté qui veut que l’Être tende à devenir tout ce qu’il peut être, la Divinité s’épanche ainsi hors d’elle-même, elle se contemple dans le Verbe, elle engendre le Monde des créatures. De l’Unité divine sort ainsi la Pluralité.

Et inversement : dans la pluralité se retrouve l’unité. En toute créature il y a l’Être, il y a Dieu. Descends en toi-même et tout au fond de ton âme tu trouveras une étincelle incréée qui est Dieu. Les hommes diffèrent selon la chair et la naissance, et par les facultés inférieures de leurs âmes : par l’Esprit, par l’étincelle qui luit au fond de chaque âme, ils sont un seul homme, une seule âme, et cette âme est le Verbe et le Verbe est Dieu. Au sein de l’Être, l’âme et Dieu se rejoignent et se confondent. Si vous rentrez en vous-même, si vous vous recueillez en votre âme, vous êtes en Dieu, — vous êtes Dieu.